Obélisque de Fontainebleau


Obélisque de Fontainebleau
L'Obélisque de Fontainebleau vu du château, jardin anglais.
 
Au carrefour de l’Obélisque s’élevait autrefois la Croix Saint-Jacques, érigée au début du XVIIe siècle, puis réédifiéé le 23 juillet 1670 par la Confrérie des pèlerins de Saint-Jacques de Compostelle qui y organisait des processions.
 
Croix Saint Jacques, Fontainebleau 1727La Croix Saint-Jacques sur la carte de Fontainebleau 
dressée par André Desquinemare en 1727.

En 1785, M. de Cheyssac, grand-maître des Eaux et Forêts de l'Île de France, prit l’initiative de faire construire un obélisque en l’honneur de la reine Marie-Antoinette et de ses enfants, à la place de l'ancienne croix Saint-Jacques. M. de Cheyssac utilisa l’argent de l'administration forestière pour financer les travaux. Haut de 21 mètres, le monument est plus fin de moitié par rapport à son modèle, l’obélisque de la place Saint-Pierre au Vatican. Les plans sont de l’architecte Pierre Rousseau, qui signa le boudoir de la reine au château. L’obélisque était autrefois supporté par quatre dauphins de pierre et surmonté d’un aigle autrichien. Sur trois des faces du monument était inscrits, en lettres de bronze, les nom des enfants de Marie-Antoinette : le dauphin Louis-Joseph, son frêre Louis-Charles, futur Louis XVII et leur sœur Marie-Thérèse. Sur la quatrième face est indiqué le nom de la reine.

Obélisque de Fontainebleau

L'Obélisque de Fontainebleau par Antoine-Laurent Castellan, vers 1830.


Avec la Croix de Franchard, l’Obélisque échappa à la fureur révolutionnaire. On se contenta, le 13 août 1792, de faire disparaître les inscriptions en bronze ainsi que les chaînes qui reliaient les bornes et qu’on accusait d’être un emblême d’esclavage. Trois jours plus tard, sur la demande du curé constitutionnel de Fontainebleau, un bonnet phrygien en fer blanc fut transporté, en procession, après la messe, jusqu’à l’Obélisque. Là, il fut hissé à son sommet en présence des autorités. Au pied du monument « ainsi purifié des souillures de ses origines », la garde nationale fit dire une messe solennelle pour le repos de ses frères d’armes tués dans la journée du 10 août, lors de la prise du palais des Tuileries. En 1804, lorsque Bonaparte découvrit l’Obélisque, il demanda si le monument était orienté comme en Égypte, personne ne sut lui répondre. Le Premier consul, observant sur le pavé l’ombre du monument, déclara : « Non, elle n’est point orientée, elle fait face à la ville, c’est bien ». Le 5 février 1805, le bonnet phrygien fut remplacé par un aigle impérial que Louis XVIII fit retirer dès son retour.  

Obélisque de Fontainebleau
L'Obélisque de Fontainebleau vers 1850, album genévrier édité par Denecourt.
 
Le 14 février 1814, les cosaques de l'ataman Matvei Platov arrivèrent à Fontainebleau et installèrent leur bivouac au rond-point de l'Obélisque. De nombreux habitants abandonnèrent la ville, les riches se rendirent à Paris, les pauvres se cachèrent en forêt. Le maire de la ville, M. Dubois d'Arneuville, décida d'envoyer une délégation s'entendre avec l'ennemi des termes de la capitulation, en espérant éviter à Fontainebleau que ces farouches guerriers entrent dans la ville. Mais les cavaliers russes ne l'entendirent pas ainsi, ils entrèrent, montés sur leurs petits chevaux gris, l'air hirsute, avec leurs grandes barbes, coiffés de bonnets pointus, armés de longues lances et de pistolets. Le soir, les cosaques furent renforcés de six mille Autrichiens et Badois, nombre d'entre eux s'installèrent sur la route de Paris. Fontainebleau fut frappée d'une contribution de guerre consistant en bestiaux, fourrage, pain, vin, eau-de-vie, étoffes et plus de cent mille francs, somme considérable à l'époque, faute de quoi, deux jours de pillage militaire seraient infligés à la ville. Cette contribution pécuniaire fut impossible à réaliser et le pillage semblait inévitable quand le 17 février, au lever du jour, les troupes des généraux Charpentier et Allix de Vaux débouchèrent de la route de Melun et chassèrent l'ennemi de Fontainebleau. Les derniers coups de feu furent tirés sur les Hongrois qui campaient encore autour de l'Obélisque, quelques éclats de boulets des canons français touchèrent le monument. Chassées de Fontainebleau, les troupes étrangères y revinrent le 5 juin 1815.
 
Obélisque de Fontainebleau
L'Obélisque de Fontainebleau vers 1900.

En 1817, Maximilien Hurtault, l'architecte du palais, restaura l'Obélisque ainsi que les bornes et les chaînes qui l’entouraient. Le carrefour fut agrandi et orné de colonnes de grès qu’on plaça à l’entrée des principales routes. Ces colonnes, qui faisaient office de bornes routières, ont été plusieurs fois déplacées, elles sont inscrites aux monuments historiques depuis 1949. En 1864, Napoléon III fit rétablir les inscriptions en lettres de bronze. Une erreur fut alors commise, on se trompa sur la date de naissance de Marie-Thérèse de France, surnommée « Madame Royale ». Il fut inscrit : 28 décembre 1778, alors que le premier enfant de Marie-Antoinette est née le 19 décembre. L'erreur trouve son origine dans l'ouvrage de référence donné au graveur au moment de la restauration de l’Obélisque : l'Abrégé chronologique de l'Histoire de France de Hénault, Auguis et Boudot, édition de 1822. Cet ouvrage fut réédité à de nombreuses reprises sans que jamais la date de naissance de Marie-Thérèse ne soit corrigée. À la fin du XIXe siècles, nombre de lettres des inscriptions de l'obélisque étaient manquantes, elles furent remplacées en 1929 par quatre plaques de marbre incrustées dans le monument. 

Marie-Thérèse et son frère le Dauphin Louis par Élisabeth Vigée Le Brun, 1784.

Le canton située au sud-ouest de l'Obélisque, porte le nom de Champs Minette. Cette parcelle de forêt fut donné par Henri IV à Jean-Louis de Beringhem son premier écuyer, mais ses successeurs n'ayant pu produire l'acte de donation, le réformateur M. Barillon d'Amoncourt, en ordonna la réunion au domaine royal en 1664. Le locataire de M. de Beringhem était un sieur Minette : d'où le nom du canton. Louis XIV y fit établir un Parquet. Alexis Durand, dans son ouvrage sur Fontainebleau publié en 1851, nous donne une autre version de l'origine du nom de Champ Minette : « Le 13 novembre 1776, il y eut ici une course de chevaux, au milieu d'un grand concours d'amateurs. Une somme assez considérable devait être le prix de la victoire. Le comte d'Artois, qui brillait dans ces sortes d'exercices, avait, à cet effet, acheté en Angleterre un cheval fin nommé King-Pépin, et qui coûta 17,700 louis, dit notre historien. Il arriva secrètement en France, on ne le montrait à personne, et il ne fut exhibé que le jour de la lutte. Il y avait au nombre des concurrents une jeune jument, appelée Minette, appartenant au comte Falkenstein. Minette remporta le prix. Le comte d'Artois en fut si fort affligé que, de colère, il voulait tuer son cheval. On fut obligé de le dérober à ses regards, et le nom de la jeune bête est restée à cette plaine aujourd'hui boisée. » Le Champ Minette est aujourd'hui une réserve biologique dirigée qui permet la protection de l'alouette lulu, Lullula arborea.

Obélisque de Fontainebleau
L'Obélisque de Fontainebleau vers 1900. 
 
En août 1900, au carrefour de l’Obélisque, on pouvait remarquer une tente blanche sur laquelle on lisait :
M. et Mme O’Malley
Voyageurs autour du monde
1897-1902


George O’Malley était un jeune Canadien, âgé de vingt-sept ans lors de son passage à Fontainebleau. Sportif accompli et grand marcheur, il avait gagné plusieurs compétitions dans son pays et aux États-Unis d’Amérique. Lors de l’une de ses courses à pied, il battit un Australien du nom de Jean-Louis Fontaine. Ce dernier était un homme de couleur noire, ce qui n’était pas fréquent dans le monde sportif de l’époque. L’Australien Fontaine, déçu d’être vaincu par O’Malley, lui lança un défi : faire le tour du monde à pied en moins de cinq ans, avec possibilité naturellement de prendre le bateau pour passer d’un continent à l’autre. Le défi fut accepté et, le 20 octobre 1897, chacun des deux concurrents partit de San Francisco, sans un sou en poche. Des journaux décidèrent d'allouer un prix de 75.000 dollars au vainqueurs, somme alors considérable. O’Malley prit la route de l’est, avec comme premier objectif de traverser les États-Unis et rejoindre New York. Fontaine s’embarqua sur un vapeur à destination de la Chine dans l’espoir de traverser l’Asie à pied. Au moment où O’Malley concluait son pari, il allait se marier. Sa fiancée ne voulut pas le laisser partir seul et décida de l'accompagner dans son tour du monde. Les deux jeunes gens se marièrent la veille du départ et le lendemain ils partaient pour un très long voyage de noces. 
 

Le couple O’Malley traversa le continent américain jusqu'à Québec où il embarqua pour Liverpool. Puis il traversa l'Angleterre, la Belgique et arriva à Paris le 14 juin 1900. Après un bref séjour à Fontainebleau, les O’Malley reprirent leur périple vers le sud de la France pour rejoindre Marseille et embarquer vers Tanger afin de marcher jusqu'au Caire. De l'Égypte, ils avaient l'espoir de traverser l'Orient et l'Asie en moins de deux années. En mars 1903, ils sont à Naples, de retour de Palestine toujours à pied. Ils ont l’intention de finir leur tournée à bicyclette. En février 1904, on les attend au Canada après 41 000 km. Le couple a renoncer à traverser l'Asie. Quelques années plus tard, en 1911, on retrouve les O'Malley en Australie où ils donnent des conférences intitulées : « 62.000 miles on foot » ( 99.200 km à pied). Qu'est devenu l'Australien Jean-Louis Fontaine qui prit la route vers l'ouest ?  Nul ne le sait.
 
Obélisque de Fontainebleau
En 1903, le premier tour de France passe par Fontainebleau au rond point de l'Obélisque. 
 
Obélisque de Fontainebleau
Service de livraison de journaux de Paris à Fontainebleau, vers 1910.
 
Obélisque de Fontainebleau
Départ du Bol d'Or 1927, rond point de l'Obélisque à Fontainebleau. 
 
Le Bol d'or de 1927 s'est déroulé exceptionnellement en forêt de Fontainebleau. Violette Morris est la gagnante de la catégorie automobile 1100cc sur une Bollack, Netter et Cie après avoir parcouru 1619 km en 24 heures. La même année, elle perd sa licence de pilote pour port insistant du costume masculin. Collaboratrice de l'armée allemande durant l'Occupation, Violette Morris est abattue par des maquisards le 26 avril 1944 à l'âge de 51 ans.

Obélisque de Fontainebleau
L'Obélisque de Fontainebleau vers 1950. 

Obélisque de Fontainebleau
Le rond-point de l'Obélisque à Fontainebleau, vue aérienne de 1935.

 Coordonnées géographique de l'obélisque de Fontainebleau : 48°23'49.3"N 2°41'31.9"E